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L'autre pilule, un combat pour les femmes
Vidéo numérique
Révolutionnaire, la pilule RU-486 a permis d'avorter sans chirurgie, mais déchaîne des passions virulentes depuis près de trente ans. Avec son inventeur, le professeur Baulieu, retour sur un combat jamais achevé.
En 1982, le médecin chercheur Étienne-Émile Baulieu, professeur à la faculté et conseiller du laboratoire français Roussel-Uclaf, démontre l'effet d'une pilule révolutionnaire, baptisée RU-486 (initiales de la maison mère), qu'il a conçue et qui permet d'interrompre une grossesse en deçà de sept semaines sans recourir à la chirurgie. Sept ans après la légalisation de l'avortement par Simone Veil, début 1975, sa découverte cristallise la fureur de ceux qui restent opposés à l'IVG, en France comme à l'étranger, et donne lieu à une incroyable bataille, qui fait toujours rage aujourd'hui. Perçu comme un immense progrès par ceux qui considèrent que l'avortement doit relever du libre choix des femmes, le RU-486 est accusé par le camp adverse d'ouvrir la voie à une augmentation exponentielle des IVG, en simplifiant l'acte, donc en le banalisant.
Au cœur de la bataille
Les attaques sont si virulentes que le laboratoire Roussel-Uclaf, filiale du premier groupe pharmaceutique allemand, Hoechst, dont le dirigeant est lui-même opposé à l'avortement, renonce à commercialiser le RU-486, alors qu'il représente une promesse de substantiels profits. C'est grâce à la mise en demeure de Claude Évin, alors ministre de la Santé, que "la pilule abortive" est mise sur le marché en France en 1988, puis en Angleterre et en Suède. Le laboratoire refuse en revanche de vendre le brevet à la Chine - qui le pirate illico et en est aujourd'hui le premier producteur !
Vingt-sept ans après sa mise sur le marché en France, si un peu plus de 80 % des avortements se font par prise médicamenteuse, leur nombre demeure stable, autour de 210 000 par an en moyenne. Le RU-486 reste pourtant au cœur du combat contre l'avortement qui, loin d'avoir désarmé, remporte en Italie ou au Texas d'inquiétantes victoires, alors qu'une femme meurt maintenant encore toutes les huit minutes dans le monde des suites d'un avortement clandestin.
Par le biais d'archives et d'entretiens multiples et approfondis, ce documentaire tourné de part et d'autre de l'Atlantique replace cette découverte scientifique majeure dans son contexte et retrace la bataille jamais achevée pour le droit à l'avortement. Face au professeur Baulieu, au généticien Axel Kahn, aux gynécologues Joëlle Kauffmann et Élisabeth Aubeny et à la fondatrice de l'association néerlandaise Women On Waves (qui permet aux ressortissantes de pays où l'IVG n'est pas légal d'accéder au RU-486 en naviguant hors des eaux territoriales), s'expriment aussi des adversaires résolus de l'avortement - et donc du RU-486 -, dont certains militent activement pour dissuader, voire empêcher, les femmes d'y accéder.